Entretien avec Roy Kristensen en mars 2001 (par Uriel)

Vous êtes-vous déjà dit que votre magazine habituel ne répondait pas à toutes vos interrogations sur votre groupe préféré ? Pensez-vous que toutes les chroniques se répètent et sont taillées sur mesure pour faire plaisir aux labels ? Si c'est le cas, pourquoi ne pas revenir à la qualité originale, au journalisme sans compromissions par des gens honnêtes et passionnés ? OK, pour ce faire vous avez déjà "Les Grimoires De Paracelse" certes, mais si vous cherchez aussi quelque chose que vous pouvez tenir entre vos mains pendant vos séjours sur le siège des toilettes, laissez-moi vous conseiller de consacrer quelques deniers à IMHOTEP 'Zine, la ressource norvégienne ultime pour rester au contact de l'underground. C'est presque une honte que Roy ne vende pas davantage que 500 copies de ses numéros. Toutes les bonnes choses sont bonnes à explorer. Après vous pourrez bien entendu toujours avoir recours à Hard Rock, Hard 'N' Heavy ou autres, mais au moins ce sera pour comparer et pas pour dire amen à une parole d'évangile parfois pas très catholique… Cette interview toujours d'actualité a été réalisée avec Roy Kristensen en mars 2001.
IMHOTEP n°7 est dispo pour $5/$4 auprès de : IMHOTEP, Berglyveien 9, 1262 Oslo, Norvège.


1. Hails Roy ! Merci de m'offrir cette possibilité de causer au cerveau du grand IMHOTEP. Avant de commencer, dis-moi donc à quoi ressemble le ciel aujourd'hui au-dessus de la terre d'Odin ?

Bulletin météo : tout ce que nous pouvons voir se résume à "A Blaze In The Northern Sky". Non, bon en fait le temps est chouette, c'est le printemps, donc c'est chaud et changeant. Dans pas longtemps ça va flotter, peut-être demain. Et maintenant ça devient chiant de parler de ça alors on va passer à la première question. Tout de même avant de commencer je dois ajouter un grand "merci" pour ton intérêt envers IMHOTEP. Je suis persuadé que ce sera une interview sympa, avec seulement des réponses courtes, he he.

2. Tu parles ! OK, on commence. Ton zine IMHOTEP va bientôt éditer son septième numéro (NDUriel : à présent disponible depuis environ un an), donc on peu dire que tu as dépassé le stade de la mise en route. Si tu devais résumer le développement d'IMHOTEP en quelques phrases ?

Et bien j'avais 24 ans lorsque le premier numéro a vu la lumière du jour et l'obscurité de la nuit. Je voulais commencer avant mais d'une façon ou d'une autre je n'ai jamais eu l'opportunité de m'y mettre. Je ne vais pas parler de chaque numéro en détail, mais dire que le développement n'a pas été gigantesque depuis IMHOTEP #1. Bien sûr il y a désormais moins d'erreurs d'orthographe et de grammaire, mais l'intérêt vis-à-vis de la musique est plus ou moins resté identique, donc les interviews tendent à être du même acabit. Je pose des questions sur des sujets qui m'intéressent, et je ne pense jamais à plaire au lecteur. En fait, je ne me sens pas obligé de distribuer IMHOTEP, mais puisque je consacre autant d'effort à la réalisation du zine j'aime autant le faire partager au public, parce que je pense qu'il a quelque chose à offrir. Le zine est toujours assez modeste, je crois qu'IMHOTEP #6 a vendu autour de 500 copies. Ce n'est pas énorme lorsque l'on songe au prix et à la qualité d'impression. C'est toujours un zine underground, mais certaines choses vont changer. On en reparlera plus loin…

3. On en reparle tout de suite je dirais : le numéro 7 devrait voir le jour en avril 2001. A quoi doivent s'attendre les lecteurs cette fois-ci ? Après une pause de presque un an, y aura-t-il des évolutions significatives au niveau du lay-out, du nombre de chroniques ?

Avril/mai en fait… Il y a toujours des retards imprévus. Les lecteurs peuvent espérer les bigs interviews, bien longues et (peut-être) en profondeur. Certains des groupes seront RHAPSODY, MORBID ANGEL, THE BLACK LEAGUE, SOLEFALD, NILE et environ 6 autres. Il y aura autour de 250 chroniques. Le lay-out sera simple, structuré et sans extravagances. Il y aura toutefois 8 pages couleur. Un point sur les interviews : certaines ont été réalisées en plusieurs fois. Par exemple l'interview de RHAPSODY se compose d'une partie faite en 1999 et l'autre récemment (fin 2000). L'interview de MORBID ANGEL est en trois parties. Donc dans un sens les interviews sont évolutives. Sur le flyer je parle de 56 pages, mais je suis sûr que ça va encore tourner autour des 70 pages avec impression professionnelle. Bordel, mes économies vont tout droit en enfer…

4. Désolé pour ton portefeuille Roy, mais les lecteurs verront sûrement la différence… Bien entendu l'avantage majeur d'IMHOTEP sur les publications à grande échelle est que tu n'as pas de date limite de sortie, et pas d'autre restriction sur le contenu que ta propre éthique. Cependant, n'as-tu jamais été tenté de sortir IMHOTEP plus régulièrement (et donc de vendre plus) en réduisant le nombre de pages, de chroniques et la longueur des interviews ? Un peu de couleur ?

Nous y avons pensé. A ce jour nous sommes cinq à faire des chroniques, et je pense que ça ne va pas trop bouger pendant un moment. Deux d'entre nous font des interviews à un rythme d'esclaves. Donc même si je voulais que le nouveau numéro se limite à 56 pages, ce sera davantage. La longueur moyenne des interviews sera probablement de 5-6 pages. Et comme je l'ai déjà dit nous aurons 8 pages couleur, les quatre de couverture et quatre pages au milieu. IMHOTEP sera à l'avenir plus régulier, mais pas de date butoir. Nous prévoyons de sortir le prochain en automne, genre août/septembre 2001, avec entre autres SYMPHONY X, ULVER, MAYHEM, BORKNAGAR et bien d'autres.

5. J'en ai déjà l'eau à la bouche ! En conséquence je dois aborder le sujet de tes interviews, qui ont été si je ne me trompe l'objet de vertes critiques de la part de quelques personnes. L'interview de groupe standard dans IMHOTEP s'étale sur au moins quatre pages (parfois deux fois plus), est imprimée en petits caractères et il faut investir des trésors d'attention pour faire le tri entre tes questions et les réponses du groupe. Personnellement je maintiens qu'une telle méthode est excellente parce que l'on a réellement l'impression d'être entraîné dans le fil d'une conversation authentique, la plupart du temps intéressante, au lieu d'une brochette de questions balancées les unes à la suite des autres sans ligne logique. Comment en es-tu venu à procéder de la sorte ? Est-ce que cela implique une masse de travail conséquente que de préparer une interview, ou est-ce que tu mises sur l'improvisation et sur le réactif suivant la façon dont le groupe répond ?

Oh, au fond j'ai surtout procédé ainsi dans le but de me démarquer. Ou, dans le cas d'IMHOTEP #5, pour économiser mes finances. En temps normal le zine aurait du faire 8 pages de plus, et j'aurais du utiliser une police plus grande. Ceci dit, je te rejoins pour ce qui est du niveau d'implication dans les interviews. Pour te donner un exemple, en lisant Dauthus #2, mes yeux saignent à cause du choix de la taille de police, mais à la fin j'adore ce zine pour son contenu. Par contre, pour le numéro 7 à venir les questions sont en gras et les réponses en normal. Pourquoi ? Simplement parce que la plupart des lecteurs ne sont pas comme toi et moi, ils ont besoin d'une lisibilité plus évidente. Au moins, à partir de maintenant ils ne pourront plus s'en plaindre. Clair que ça prend énormément de temps pour préparer une interview. Prends l'interview de SATYRICON pour le #6, elle a été mûrement concoctée pendant un mois. Je n'écoute pas beaucoup d'autres albums dans ces moments là que ceux des groupes que j'interviewe, et en général je ne prépare qu'une interview à la fois. Donc lorsque je suis occupé par une interview j'écris moins de chroniques. Je lis d'autres interviews du groupe, je lis les paroles des albums et j'écoute la musique encore et encore… Jusqu'à présent l'interview qui fut pour moi la plus ardue à préparer fut celle de MONUMENTUM dans IMHOTEP #3. J'ai passé trois jours entiers à n'écouter rien d'autres que leur magnifique album (NDUriel : "In Absentia Christi"), et à écrire les questions en même temps. Mais à l'arrivée j'ai eu les réponses que je méritais. En fait je ne fais pas trop attention aux réponses en elles-même. Qu'une question soit traitée brièvement ou plus en profondeur, je laisse cela au choix du groupe. Et je crée les questions à partir de ma propre curiosité. Simple !

6. Ta devise semble être : pas de chronique avant au moins 10 écoutes… OK, c'est certainement la meilleure façon de faire ressortir un point de vue objectif et complet, et j'essaie moi-même d'offrir à chaque album un maximum d'attention avant de commencer à écrire. Mais je dois avouer que si je procédais aussi minutieusement pour chaque CD je n'écrirais guère plus d'une chronique par mois… Et IMHOTEP contient une moyenne de 300 chroniques par numéro ! Dis voir, est-ce que tu as un compresseur de musique greffé dans le cerveau ?

D'abord nous sommes plusieurs à faire des chroniques pour IMHOTEP. Et non, je n'ai pas toujours besoin d'écouter un CD 10 fois avant de le chroniquer. En fait il m'est arrivé de n'écouter qu'un demi-album avant de choisir d'écrire quelques mots bien sentis sur le gaspillage de CD… Mais un CD comme celui de EBONY LAKE, ou bien encore SPIRAL ARCHITECT, nécessite au moins 20 écoutes. Tout dépend de la musique, c'est une évidence. Et c'est un sentiment si agréable que de pouvoir être subjectif envers la musique. Donc, mon compresseur interne se borne à faire le tri entre ce que j'aime et ce que je n'aime pas, voilà tout. Bien sûr, ça aide pour certains albums d'utiliser le casque. Tu captes mieux les détails.

7. A priori nous sommes d'accord sur un point : il y a beaucoup trop de sorties d'album ces temps-ci. Nous voyons des labels mettre sur le marché jusqu'à cinq albums par mois, et il débarque toutes les semaines un soi-disant "meilleur nouveau groupe de tous les temps". La qualité globale est en conséquence sur la pente descendante, mais au-delà c'est la prospérité d'une certaine idée de la musique qui est menacée. En effet, les gens ne sont pas beaucoup plus riches qu'il y a quelques années et ne peuvent pas acheter tous les CD qu'ils trouvent intéressants, ce qui entraîne une dispersion des goûts et des mentalités sur un échiquier musical de plus en plus large. Ton point de vue là-dessus ? Est-ce que les jours heureux du metal sont derrière nous à tout jamais ?

A-t-on vraiment besoin d'acheter tous les CD intéressants ? Non, s'il sort disons 100 CD intéressants, tu peux largement faire avec 10 par an. Je me rappelle en 1986-87, lorsque tout ce que nous avions à nous mettre sous la dent, c'étaient SLAYER, METALLICA, MEGADETH, BATHORY, KING DIAMOND, MERCYFUL FATE et IRON MAIDEN. A cette époque je connaissais tous les albums par cœur et j'étais à fond dedans. Aujourd'hui… Bon OK je n'ai pas trop de problèmes pour me tenir au courant parce que je reçois presque toute ma musique gratuitement. J'achète les vynils des CD qui me plaisent, et quelques rares CD aussi. Ton point de vue sur l'élargissement des goûts est intéressant. Et pourquoi cela serait-il nécessairement mauvais ? Si on regarde les choses en face, 95% de tous les albums qui sortent aujourd'hui ne sont pas absolument indispensables. Ils sont là, point barre. Donc ce que nous devrions faire c'est acheter les 5% que nous aimons le plus, et n'écouter que ceux-ci. Au final seuls les meilleurs groupes survivraient. Regarde ce qui est arrivé à la scène Death. Les seuls survivants du passé ont nom MORBID ANGEL et à la rigueur CANNIBAL CORPSE. MORBID ANGEL a toujours vendu, peu importe si les goûts ont évolué. La façon qu'a chacun d'aborder la musique est unique. Mais quand tu vois la dernière pub pour le "meilleur nouveau groupe du millénaire", tu fais l'effort d'en écouter. Et si au moins 20% des auditeurs achètent l'album, le label est content. Ce que je n'arrive pas trop à suivre, c'est que n'importe quel groupe soit ou bien signé, ou bien monte directement son propre label. Mais bon encore une fois, est-ce que ça me regarde ? Chacun n'a-t-il pas le droit de faire comme ça lui chante ? Ce n'est pas comme si je voulais être de retour dans les jours défunts de l'underground pur. Le problème, c'est qu'aujourd'hui il y a un nombre de groupes extrêmement élevé. Et parmi ces groupes il y a tellement de bons groupes. Le résultat est que très peu de groupes parviennent à cristalliser le niveau d'attention qu'ils méritent.

8. En effet, c'est un fait que le metal attire de plus en plus de musiciens de niveau plus que correct, et s'il fallait opérer une sélection stricte de l'élite absolue, beaucoup de groupes méritants ne pourraient jamais décrocher de deal. La spirale du business se déroule inexorablement contre toutes les marées et seul l'avenir nous apprendra si nos craintes sont justifiées. Dans cette optique le rôle de l'Internet est très discuté. A ton avis, dans quelle mesure la vente et l'achat de musique on-line peut-elle s'étendre ? Et qu'en est-il des sites genre Napster ? Est-ce une solution ou faut-il les bannir ?

Je ne connais pas Napster et je n'en ai pas besoin. Pour parler franc, il n'y a aucun moyen que je puisse tenir entre mes mains un truc téléchargé sur Napster ! En fait j'ai carrément besoin du vinyl. Ceci étant je ne suis pas farouchement opposé à l'idée de musique on-line. Les gens sont libres de décider ce qui est le meilleur pour eux, et Internet peut être un bon moyen de découvrir des groupes et leur musique, tant que cela reste un outil de découverte et pas de business souterrain. Mais au moins pour ce qui est des métalleux, j'ai le sentiment que les gens préfèrent avoir le packaging intégral dans leurs mains, donc je ne pense pas que Napster puisse détruire les ventes du dernier DIMMU BORGIR. Peut-être que pour METALLICA, c'est une autre histoire…

9. Regardons deux labels d'une taille a peu près similaire : Last Episode (Allemagne) et Nocturnal Art (Norvège). Le premier est essentiellement focalisé sur le marché intérieur et signe presque exclusivement de la sous-merde allemande (cf. AEBA, DUNKELGRAFEN, EMINENZ…), bien que la situation se soit sensiblement améliorée récemment. Le second, spécialisé dans les nouveaux courants symphoniques du Black Metal, a ouvert ses portes à des challengers de tous horizons (CHORONZON, SIRIUS...) et fait mouche avec chaque album. Bon, évidemment c'est un discours vulgarisé, mais qui met en lumière deux approches divergentes de gestion artistique d'un label. Ai-je besoin de demander quelle initiative tu supportes le plus ? Vois-tu une alternative permettant de supporter efficacement une scène locale tout en travaillant pour la qualité ?

En y réfléchissant je pense qu'on a besoin des deux labels - même si, comme tu le fais remarquer, c'est surtout Nocturnal Art qui fait mouche le plus souvent (mais pas non plus à chaque voyage). Last Episode a beaucoup de daubes, c'est vrai, mais à mon avis c'est leur façon de surfer sur les "trends" qui marchent le plus à leurs yeux. C'est la même chose avec CRADLE OF FILTH et DIMMU BORGIR. Je suis sûr que tu ne peux pas mettre toutes les ventes sur le compte des mega campagnes de promotion, des T-shirts provocants ou des couvertures, mais ça aide indéniablement. Mais au bout du compte tu ne peux pas écouter une campagne de promo ou un T-shirt. Ce qui compte vraiment, c'est la musique. Travailler pour la qualité est une chose assez facile au fond. Tu n'as qu'à faire exactement ce que tu aimes, et croire en toi. Si tu as en toi une once de créativité, alors ta création sera un succès. Dès que tu commences à faire des compromis, tu perds quelque chose de cette création. Dans IMHOTEP #7 j'ai une interview avec les Portugais de MALEVOLENCE, et leur label est probablement l'un des meilleurs. Je n'ai jamais entendu parler d'un label qui appuie un groupe à ce point là. Bien entendu ils n'ont pas le fric, comme Nuclear Blast ou Century Media, mais ils ont cent fois leur dévouement. Et c'est pareil avec Moonfog Productions. Cite moi un album miteux sorti sous la bannière Moonfog (peut-être à l'exception de STORM ?). En conclusion, supporte avant tout ce en quoi tu crois. Je ne vois pas l'intérêt de supporter par principe tout ce qui est local si ça n'en vaut pas le coup, que ce soit le groupe du village ou la station service ou quoi que ce soit. Le truc c'est que tu dois définir pour toi-même ce que tu considères être de la qualité, et tu n'as plus qu'à la supporter ! C'est enfantin !

10. Enfantin en effet. Mais revenons à IMHOTEP. Pas mal de personnes contribuent au zine, en particulier Sauli Vuoti qui est ton co-rédacteur en chef. Peux-tu présenter ta petite équipe ? Ont-ils d'autres activités liées au metal en dehors d'IMHOTEP ?

Nous sommes cinq à nous partager la besogne, et jusqu'ici Sauli et moi-même nous partageons les interviews et le travail d'édition. L'équipe se compose de Jan Roger Pettersen de Trondheim en Norvège. Je dois dire que j'aime énormément ses chroniques. Je n'ai pas connaissance d'autres implications metal de sa part. Janne Hutha, qui est suédois, possède son propre zine, Barbaric Poetry. C'est un excellent écrivain, beaucoup plus cynique que moi, et je suis très heureux de le compter comme collaborateur. Frank Hansen contribue très activement. Il est à fond dans le metal et a des opinions très tranchées ! Tu devrais lire plus d'articles de sa part à l'avenir car il va sans doute devenir co-éditeur. Sauli Vuoti est mon co-éditeur actuel. Il dispose d'une bonne éducation musicale, donc je pense que c'est le plus apte d'entre nous à parler de la musique en connaissance de cause. Il fait beaucoup d'interviews (plus que moi ces derniers temps), et il bosse pour le développement d'IMHOTEP. Tu vas adorer son interview de KATATONIA dans IMHOTEP #7, j'en suis sûr. Et puis il y a moi.

11. Et puis il y a toi... Qu'en est-il donc, cher Roy ? Parlons un peu de tes goûts musicaux. Je crois savoir que tu es un enragé de la musique très ouvert d'esprit, pas vrai ?

Je ne me qualifierais pas d'enragé, mais je suis ouvert d'esprit, ça pas de problème. Ceci étant, je peux tout aussi bien être étroit d'esprit dans certains cas, en particulier lorsqu'on en vient à la musique Populaire, au Rock, au Jazz ou au Blues. Malgré tout j'aime certains trucs de Pop, comme BJÖRK. Maintenant la suite naturelle serait de te nommer 10 de mes groupes favoris, 10 groupes avec des approches différentes : SLAYER, THE YOUNG GODS, LIMBONIC ART, MORBID ANGEL, Carl Orff's "Carmina Burana" (NDUriel : très cool comme groupe, bonne attitude scénique ;-)), KING DIAMOND / MERCYFUL FATE, DARK FUNERAL, IRON MAIDEN et, les derniers mais pas les moindres, RHAPSODY et SYMPHONY X. Si tu connais ces groupes et leurs albums tu comprendras que mes goûts sont pour le moins variés.

12. Tu mentionnes même à plusieurs reprises ton admiration pour le groupe de néo-classique apocalyptique PUISSANCE. C'est exactement le genre de musique qui fait courir un frisson glacé dans mon dos et une excitation destructrice dans mes veines. Peux-tu décrire tes sentiments par rapport à cette musique ? Connais-tu BLOOD AXIS ?

Je connais BLOOD AXIS, oui. J'ai leur "Gospel Of The Horns" et leur album live "Blot - Sacrifice In Sweden". Quelques morceaux sont assez pesants, et je n'aime pas trop les vocaux monotones au milieu. Mais certaines autres chansons sont géniales, notamment celle où ils utilisent la base de Roméo & Juliette. Je suis une personne très positive, et je me considère comme assez normal… je pense. En tout cas je ne me conduis pas de façon criminelle ou quoi que ce soit. Pourtant, il y a un côté sombre qui demande à être satisfait. Et c'est le Metal qui s'y colle en général. Donc pourquoi est-ce que j'aime PUISSANCE à ce point ? En fait je ne peux pas trop l'expliquer. Ca sonne juste, tout simplement. Bien sûr, l'aspect militariste et majestueux de leur musique est bien tripant. J'aime les marches infernales cadencées, mais aussi la beauté paradoxale de leur musique. Et j'aime aussi leur concept, même si je ne le cautionne pas toujours.

13. Et que penses-tu du projet de Peter Anderson : RAISON D'ÊTRE ? Bien que cet artiste se consacre à des atmosphères bien plus softs et minimalistes, je pense que ses albums ne pourraient pas être une plus parfaire B.O. pour un âge où la Terre ne sera plus qu'un océan écorché de sol brûlé et de vapeur toxiques hanté par une poignée de ruines humaines combattant pour survivre parmi des résidus de civilisation… T'arrive-t-il de rêver de ta propre vision de jours post-apocalyptiques ? (On dirait bien que c'est mon cas, peut-être que je devrais consulter un psychiatre…)

Hmmm… Jusqu'ici je n'ai pas encore été d'humeur pour RAISON D'ÊTRE. Sa musique demeure bien trop ennuyeuse pour moi. Quelque part, je crois qu'il est cependant possible que je devienne plus réceptif à ses créations un beau jour… Mais je suis d'accord avec ta vue d'une ère post-apocalyptique. Je pense que c'est le genre de monde que PUISSANCE décrivent aussi à merveille avec leurs hymnes à la destruction. Comment cette destruction se produira-t-elle, quand aura-t-elle lieu ? Je l'ignore. Je suppose (et espère) que Mère Nature reprendra possession de ce qui lui appartient et balayera la race humaine de la surface de la Terre lorsque son absurdité aura dépassé les dernières limites. Non, je ne suis pas un misanthrope en puissance, et je suis heureux de vivre, je suis heureux pour le Metal, le sexe, le soleil, les ténèbres. Néanmoins je n'accorde pas un grand crédit aux Hommes dans leur ensemble. Tout est basé sur la soif de toujours plus d'argent, plus de développement économique, des technologies toujours plus avancées. Tout va tout simplement beaucoup trop vite, et l'Humanité est en quelque sorte laissée à la traîne. Donc, un beau jour, nous ne serons plus, et je serai le premier à féliciter Mère Nature pour son attaque.

14. Quel(s) album(s) écoutes-tu en répondant à cette interview ?

CADAVER INC. "Discipline" parce que je dois en écrire une chronique bientôt. MEGADETH "The World Needs A Hero", que j'ai eu hier. Un retour aux sources en quelque sorte. Il y a aussi NIGHTWISH avec leur fabuleux "Wishmaster". Je suis dingue de cet album. Je n'appellerais pas ça de la musique originale pour deux sous, mais la performance de la vocaliste fait toute la différence. C'est un album grandiose avec un maximum de tubes. Enfin j'écoute en ce moment même "Ad Noctum - Dynasty Of Death" de LIMBONIC ART. J'ai acheté le coffret CD avec les bonus tracks il y a quelques temps, que j'avais déjà en vynil. LIMBONIC ART est mon groupe favori, ni plus ni moins.

15. C'est aussi l'un des miens, même si je suis resté un peu scotché à leur période "Moon In The Scorpio". Parlons du futur d'IMHOTEP. Combien de temps as-tu l'intention de poursuivre ? N'es-tu pas parfois fatigué du job harassant d'édition, de publicité, de devoir entretenir tous ces contacts ? As-tu le sentiment que la quantité de travail que tu injectes dans IMHOTEP est amorti par le feedback que tu reçois de tes lecteurs, ou plutôt par la quantité de musique gratuite que tu découvres dans ta boîte aux lettres tous les matins ?

En fait c'est un peu tordu que de dire ça mais des fois j'en ai marre de trouver des CD dans ma boîte aux lettres. Il y en a tout simplement beaucoup trop, et plus ça va moins j'ai le sentiment de pouvoir rendre correctement justice à chaque album qui me parvient. Des promos ici, là, partout… D'un autre côté je tiens à rester au courant de ce qui se passe. Je ne regretterai jamais cette activité, parce que je l'ai choisie de mon plein gré. Je n'envisage pas la fin d'IMHOTEP dans les 10-20 années à venir. Seulement si je venais à connaître de sérieux problèmes financiers… Bien sûr de temps à autres c'est barbant d'écrire une chronique, de conduire une interview ou de répondre à un tas de lettres et d'e-mails. Lorsque ça m'arrive je remets ça au lendemain, voilà tout. Au sujet du feedback, je n'en reçois pas tant que ça personnellement en fait. J'ai entendu ici et là qu'IMHOTEP est considéré comme culte. OK, si c'est culte que d'être un type banal, d'aimer la musique et les groupes, d'en interviewer quelques-uns uns, de bricoler un lay-out et de vendre 300 copies - alors IMHOTEP est effectivement culte.

16. Dans IMHOTEP #2 tu signalais que tu ne réaliserais jamais d'interview avec SATYRICON pour la bonne raison qu'ils refusaient de répondre à leur courrier. Pourtant dans #6, il y a une interview avec Satyr, qui est d'ailleurs l'une des meilleures que j'ai lue dans ton zine. Puis-je connaître la raison de ce revirement ?

En fait ça avait rapport avec ma façon de penser à cette époque. Je trouvais cela stupide et arrogant qu'un groupe de taille encore modeste comme SATYRICON ne trouve pas le temps de communiquer directement avec leurs fans par courrier. Et puis il y a eu cette note dans "Nemesis Divina" disant qu'ils ne répondraient à aucune lettre. Le temps aidant, j'ai compris qu'il est nécessaire de faire des choix, de savoir définir des priorités. Je dois moi-même procéder à un tri dans les lettres et les e-mails que je reçois. Donc au bout du compte, j'ai changé d'opinion envers SATYRICON. Et à dire vrai je me réjouis que Satyr ait décidé de se concentrer exclusivement sur le groupe et le label, car sans cette focalisation il est possible qu'un album aussi grandiose que "Rebel Extravaganza" n'ait pas pu voir le jour.

17. Es-tu toi-même musicien ? Penses-tu que ce soit absolument nécessaire lorsque l'on est journaliste musical que d'avoir des compétences poussées en matière de technique des instruments ?

Non, je ne suis pas du tout musicien. Je suis incapable de jouer correctement d'un instrument, même si j'ai quelques notions de guitare acoustique. Et ce n'est bien entendu pas une nécessité d'avoir des connaissances instrumentales très approfondies. Oui, quoi ! Sans mon manque de talent, IMHOTEP ne ressemblerait pas à ce que tu connais. La musique est tout autant une affaire d'atmosphères et de feeling, et pour ça je m'y connais. Bien sûr, je sais aussi ce que j'aime ou pas, peu importe le degré technique des groupes. Genre, j'aime ATHEIST pour les variations et ces parties super complexes vraiment trop cool. Mais j'aime aussi des musiques minimalistes où presque rien ne se passe. Un exemple est l'album de Steve Von Till (of NEUROSIS). C'est si tendre et silencieux... et extrêmement atmosphérique. J'ai le sentiment que si un journaliste connaît à fond les instruments, les chroniques peuvent très vite trop pencher du côté du jeu des musiciens et oublier complètement le feeling de la musique.

18. Ta marque de bière favorite ? A quel stade de dépendance alcoolique écris-tu en général tes articles ? On m'a toujours dit que quelques cubitainers du breuvage doré aiguise la perception des sons comme rien au monde…

Je conduis rarement mes interviews sous l'emprise de l'alcool. De plus je ne fume rien, et je ne sniffe pas l'or blanc. Je veux dire que si je devais boire comme un trou lorsque je fais des questions ou écris des chroniques, cela signifierait probablement que je suis un alcoolo. Cela ne veut pas dire que je n'aime pas la bière, au contraire. En général je bois surtout de la Brune de Newcastle. J'aime la bière lorsqu'elle est bien dosée entre clarté et ténèbres. Ceci dit je ne connais pas beaucoup de noms différents, j'aime la bière, un point c'est tout. Et lorsque je suis vraiment trop bourré, je tombe en général rapidement en léthargie. Tout de même, je suis d'accord avec toi : la musique peut être encore meilleure avec quelques grammes dans les veines !

OK, j'en ai terminé avec le bombardement en règle. J'espère que ton esprit est encore en un seul morceau… Si tu es d'accord j'aimerais toutefois conclure avec un petit questionnaire innofensif pour permettre à nos lecteurs de mieux cerner la personnalité de Roy Kristensen.

19. Tout va bien chez toi ?

Oui, ça va, merci. Pour être franc, je me suis senti un peu au-dessous de la moyenne ces derniers temps, c'est pourquoi IMHOTEP #7 a été retardé de trois mois, malheureusement. Ces jours ci ma force psychologique reprend doucement mais sûrement du poil de la bête. J'ai juste été fatigué de beaucoup de choses, du boulot, de ma copine, des amis en général, de certaines musiques, de mes cheveux, de mon corps, presque tout… Non, je n'ai pas été réellement déprimé, je n'étais simplement pas concentré sur le sujet !

20. Quelle est ta pointure ?

Environ 43.

21. Combien de fois par an vas-tu chez le coiffeur ?

Tous les deux mois ou quelque chose comme ça. Je porte les cheveux courts, depuis toujours. Mais si tu me demandes la même chose dans quelques années, il y a des chances que je n'aie plus mis les pieds chez un coiffeur depuis un moment, genre à partir de maintenant…

22. Quel est ton dessin animé préféré ?

J'aime Tom & Jerry quand il n'y a aucun dialogue. Juste la bonne vieille chasse à la souris, les baffes et les gamelles. Bien sûr, Donald Duck est toujours excellent. C'est étrange, mais de nos jours je n'aime plus tellement les cartoons (ni même les BD d'ailleurs). On dirait qu'il y a bien trop de morale et pas assez de divertissement.

23. As-tu un surnom ? Lequel ?

Pas que je sache, non. Mon nom est trop court pour en faire un surnom. A l'exemple de Bruce Willis dans "Piège de Cristal" : "Just call me Roy !".

24. Comment aimerais-tu mourir ?

Lorsqu'il ne me restera plus d'esprit. Lorsque je n'écouterai plus. Lorsque je n'aurai plus envie de mater les femmes. Lorsque je n'aimerai plus le metal. Lorsque ma vie sera terminée, quoi… Et je voudrais mourir d'une mort paisible en songeant à tout ce que j'ai accompli au cours de ma vie. Et lors de mes dernières heures, j'aimerais écouter quelques chansons des albums suivants : LIMBONIC ART : "In Abhorrence Dementia", DARK FUNERAL : "Vobiscum Satanas", MAYHEM : "De Mysteriis Dom Satanas", EMPEROR : "Anthems To The Welkin At Dusk", MERCYFUL FATE : "Don't Break The Oath", KING DIAMOND : "Them", MARDUK : "Panzer Division Marduk", DEVUL DOLL : "Dies Irae", PUISSANCE : "Back In Control", AYREON : "Ayreon", SOULGRIND : "Kalma", MORBID ANGEL : "Altars Of Madness" et enfin SLAYER : "Reign In Blood". Après ça, je pourrai mourir en paix.

25. Est-ce que tu mets ta brosse à dents dans un gobelet ?

En fait oui et non. Normalement je le fais, mais ces derniers temps ça n'est pas le cas.

26. As-tu déjà reçu des menaces de mort ?

Non, mais j'en ai une à l'encontre de Nuclear Blast. Si je reçois à nouveau une de ces stupides promos (celles où la dernière minute des chansons est fondue), je vais probablement descendre jusqu'en Allemagne et exploser leur quartier général.

27. Es-tu vraiment un fan de Conan à ce point ? D'où te vient cette admiration pour ce personnage ? Pratiques-tu toi-même le body-building pour parvenir à une musculature équivalente ? Et considères-tu que le jeu d'acteur de Schwarzenegger soit digne de la légende ?

J'adore Conan, oui. J'achète tous les numéros du comics. Je pense que ma fascination vient de cette vision générale d'un monde imaginaire. Tu sais, tu peux toujours lire "Le Seigneur Des Anneaux" ou autre chose et le visualiser intérieurement. Avec Conan la visualisation est déjà là. C'est comme si tu avais deux choses en une. Et bien entendu j'aime assez les histoires qui vont avec. Donc tu peux résumer ça à ma fascination pour le monde barbare, pour la violence, l'humour et les femmes. Non je ne suis pas une armoire à glace, je suis plutôt le type normal et seul mon estomac augmente de volume. Je suis le gars moyen avec un hobby un peu spécial : faire un zine sur le metal. Et le jeu d'Arnold ne prête pas à discussion, parce que tu ne peux pas vraiment appeler ça du jeu d'acteur. Mais, et c'est important, il y a un certain charme à ce qu'il a fait à cette époque. Et j'adore la bande son, maintenant et à jamais.

28. Quel est le dernier film pour lequel tu as regretté d'avoir payé l'entrée au cinéma ?

Ce film asiatique qui a remporté quatre Oscars (NDUriel : Tigre & Dragon ?). C'était vraiment trop barré. Cependant lorsque je l'ai revu je l'ai adoré. Etrange, mais l'esprit du créateur d'IMHOTEP est pour le moins étrange.

29. Pourquoi la poule a-t-elle traversé la rue ?

Parce que la poule s'en fichait d'aller de l'autre côté ou non. Je suis sûr qu'au début elle voulait rebrousser chemin parce qu'elle n'avait jamais vu de route auparavant, et parce que sa mère l'avait mise en garde contre les voitures meurtrières. De l'autre côté de la rue il y avait un œuf, et c'était la sœur jumelle de la poule : la vache. Quelques années plus tard, lorsqu'elles eurent toutes deux grandi un peu, elles créèrent un dessin animé, la Vache et la Poule (ou quelque chose dans ce goût là, je ne me rappelle plus trop).


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