The Devin Townsend Band - "Accelerated Evolution"
Canada - 2003 - HevyDevy Records - 54'27
1. Depth Charge
2. Storm
3. Random Analysis
4. Deadhead
5. Suicide
6. Traveller
7. Away
8. Sunday Afternoon
9. Slow Me Down

Line-up :
Devin Townsend : vocals, guitars & programming
Brian Waddell : guitars
Mike Youg : bass
Ryan van Poederooyen : drums
Dave Young : keyboards

Alors qu'un nouvel album de STRAPPING YOUNG LAD, la surpuissante bête métallique emmenée par Devin Townsend, était annoncé depuis un certain temps pour 2003, les fans du Canadien apprennent qu'un nouvel album solo de ce dernier serait enregistré en même temps et sortirait quelques semaines après le disque de SYL, celui-ci étant certainement attendu avec un peu plus de ferveur de la part du public, le groupe ayant su se forger une place de choix dans le cœur des fans de musiques ultra violentes mais néanmoins mélodiques. "Accelerated Evolution" est une transition particulière puisque Townsend a préféré construire un line-up complètement neuf plutôt que d'utiliser les talents de ses compères de STRAPPING YOUNG LAD, probablement pour faire un distinguo bien net entre ses deux facettes musicales d'une part, et certainement pour intégrer un peu de sang neuf à son équipe. On sait en effet que Gene Hoglan est bien moins réceptif au matériel de Devin en solo qu'à la musique de SYL, ceci étant certainement un argument de poids dans la balance (si j'ose m'exprimer en ces termes à propos de Maître Hoglan). Mais parlons donc de ce "Accelerated Evolution". On peut dire que Devin Townsend avait exprimé de manière magistrale sa grande habilité de compositeur sur son opus précédent, "Terria" et accouché de ce fait d'une œuvre proprement extraordinaire, remplie de magie et de moments inoubliables à travers une musique très dense, très riche, progressive et complètement guidée par la mélodie. Cette fois, Townsend cherche à simplifier son travail et proposer des titres plus accessibles, aux structures plus conventionnelles et a l'impact beaucoup plus immédiat que ses œuvres passées, qui demandaient un temps d'adaptation plus ou moins long. Il est évident que le pari est gagné car "Accelerated Evolution" s'écoute et s'apprécie dès les premiers passages dans la platine, prenant ainsi le risque d'être décevant pour qui avait succombé aux charmes de son grand œuvre, la fantastique trilogie Ocean Machine, Infinity et Terria (je délaisse volontairement Physicist qui est un disque complètement à part dans la discographie de Hevy Devy, ce qui ne signifie en aucun cas qu'il n'est pas bon). Les morceaux sont vites digérés et intégrés mais ce serait absolument faux de prétendre que cet album est par la même inférieur à ses glorieux aînés. En effet, il y a, comme toujours dans l'œuvre de Townsend, les grandes lignes mélodiques que l'on suit tout d'abord (la guitare rythmique, le chant - qui est d'ailleurs tout simplement fabuleux tout au long de "Accelerated Evolution"), et les différentes "couches" qui donnent une ampleur phénoménale à sa musique (claviers, chœurs, samples, guitares leads, divers détails dans l'interprétation des riffs, etc…) et offrent au disque une valeur ajoutée artistique beaucoup plus importante que ce que l'on puisse croire au premier abord. La construction est assez étonnante pour du Townsend puisqu'il alterne sans cesse titres très directs et plutôt puissants ("Depth Charge", "Random Analysis", "Traveller") avec d'autres beaucoup plus basés sur la mélancolie et dégageant une beauté brute mais parfaitement maîtrisée ("Storm", "Deadhead", "Suicide", "Sunday Afternoon"…). Les racines Nord-Américaines de Townsend sont très présentes, les influences Hard Rock US sont parfaitement palpables, voire même un côté "American Highschool" sur un titre tel que "Slow Me Down" (il faut écouter le titre pour voir ou je veux en venir). "Accelerated Evolution" est néanmoins un pur produit des usines Townsend, sans pour autant être une redite. On y trouve bien entendu ces multiples chœurs, parfois troublants de beauté, parfois complètement déments et iconoclastes. Une fois encore, le travail de Townsend au niveau du chant est remarquable, ce dernier s'exprimant avec tout ce que sa technicité lui permet de faire, avec une facilité, une justesse et une émotion que l'on commence à bien connaître chez lui. "Accelerated Evolution" comporte néanmoins des faiblesses. Je considère à titre personnel que "Random Analysis" ou "Traveller" sont des titres un peu inférieurs aux capacités créatives de Devin, bien que ces deux morceaux aient leur charme et ne fassent pas tâche sur l'album. Mais ils paraissent bien fades à côté de perles comme "Storm", magnifique hommage à sa femme Tracy, "Deadhead" - sans doute le meilleur morceau de l'album - dont les riffs inoubliables apportent leur lot d'images de grands espaces et de flashs de moments de bonheurs passés avec son/sa dulciné(e). En effet, le thème général de l'album est une fois encore emprunté à la vie de l'artiste et touche cette fois le domaine des sentiments, en particulier ceux qui le lient avec sa moitié, Tracy Turner, qui le suit et le soutient depuis toujours dans sa vie de musicien. Devin nous gratifie même d'un titre quasi instrumental, "Away", doté d'un très long solo de guitare vraiment magnifique. Concernant la performance des autres musiciens, pas grand chose à signaler puisqu'ils ne font que jouer ce que Townsend a écrit. L'interprétation et la production sont bien entendu très propres et d'un rendu sonore très professionnel. Finalement seul Ryan Van Poederooyen a l'occasion de briller à côté du maître de cérémonie tant son jeu de batterie est efficace et diffère de celui de Hoglan. Moins lourd et plus rock - bien que le bougre donne une leçon de batterie Metal sur "Depth Charge" -, il donne une vision différente de ce que peu être la section rythmique dans la musique de Devin Townsend.
Pour conclure, "Accelerated Evolution" n'est certes pas le meilleur album produit à ce jour par Devin Townsend mais il reste néanmoins une acquisition indispensable pour quiconque apprécie habituellement son œuvre. Pour les autres, une musique à la fois familière et surprenante vous attend, avec a la clé de longs moments de beauté musicale à déguster seul ou en bonne compagnie. L'ancien protégé de Steve Vai est décidément un artiste unique et très personnel.

Huggy : 95% (Avril 2003)



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