Shape Of Despair - "Angels Of Distress"
Finland - 2001 - Spikefarms Records - 54'56

1. Fallen - 6'09
2. Angels Of Distress - 9'43
3. Quiet These Paintings Are - 14'39
4. To Live For My Death - 17'21
5. Night's Dew - 6'59

Line-up
N.S. : vocals
P.K. : vocals
T.U. : guitars & bass
J.S. : guitars & keyboards
S.R. : drums
Toni Raehalme : session violin

Un an après le sensationnel "Shades Of…" le groupe finlandais SHAPE OF DESPAIR nous propose une seconde offrande, constituée de morceaux composés avant même la sortie de l'album précédent. Il faut dire que le cerveau du groupe, sobrement mentionné par ses initiales J.S. - bon, je vous le dis, son vrai nom est Jarno Salovaara, mais chut, hein - est très prolifique et il aurait sous le bras, ai-je ouï dire, encore quelques albums à fournir sans problèmes avant de se remettre à la composition. T.M. - comment ça ce nom ne vous dit rien ? - ayant décidé de quitter le groupe, c'est P.K. - pas de suspense ni de mauvais jeu de mot, il s'agit de Pasi Koskinen, chanteur de AMORPHIS - qui s'y colle. Ce dernier, très célèbre au pays des 1000 lacs grâce au succès de son groupe principal, montre qu'il sait grogner lui aussi ! Ses vocaux, bien que moins profonds que T.M, sont très bons, gutturaux et malsains au possible, parfois saturés d'effets, toujours opportuns et finalement assez peu présents, laissant la musique respirer. Pasi utilise même sa voix claire sur le morceau d'ouverture, "Fallen" sur lequel il vocalise dans un nuage éthéré renforçant le délicieux malaise provoqué par la musique. La musique parlons-en justement. Après nous avoir invité dans des plaines désolées nées de l'imagination de J.S. avec "Shades Of…", SHAPE OF DESPAIR nous entraîne cette fois dans un voyage un peu différent mais ne s'effectuant pas dans la gaieté pour autant. La folie, la mort, la vie après la mort, l'éternité, sont autant de thèmes auxquels on aime à réfléchir en écoutant, que dis-je en savourant ce "Angels Of Distress" d'un niveau au-dessus de tout ce qu'on pouvait imaginer. Loin de répéter la formule de son premier album - dont la force est son caractère unique -, le groupe a compris qu'il fallait évoluer pour ne pas servir du réchauffé et conserver intacte la magie de son premier album. Ici, il ralentit le tempo, alourdit ses guitares, donne une légère touche progressive à ses morceaux ("Angels Of Distress", "Quiet These Paintings Are"), mais conserve sa face hypnotique, irréelle. Sans doute ce deuxième album est-il moins original que le précédent, la recette Funeral Doom utilisée étant déjà bien rodée par d'autres, mais c'est en invitant l'auditeur à une transe mortuaire que SHAPE OF DESPAIR forge cette fois encore sa personnalité. La différence avec l'album précédent est également marquée par une diversification des titres, et un changement dans la forme. Les flûtes mystiques et aériennes ont disparues, laissant place à des violons pleureurs et plus profonds, les guitares plus grasses et le tout moins enrobé par l'auréole de réverbération qui jouait beaucoup sur l'ambiance de "Shades of…". Les morceaux sont longs, très longs même ("Quiet These Paintings Are" , "To Live For My Death"), interminables condamnations dans lesquelles on se noie avec délice. Car "Angels Of Distress" est sublime, c'est le moins que l'ont puisse dire. La beauté des mornes terres de "Shades Of…" a été remplacé par celle d'un ange posant la main sur votre épaule lors de votre trépas ou l'ivresse d'une chute sans fin. Tous ces éléments rendent l'album beaucoup plus facile d'accès et la reconnaissance de la presse et d'un public plus large que le simple cercle fermé des Grands Adorateurs du Doom - facilitée par une très bonne promo de Spikefarm - qui a suivi la sortie du disque n'est pas usurpée (pour une fois serais-je presque tenté de dire, tout en espérant que les Doomeux, contrairement au public Black Metal, ne vont pas devenir dédaigneux à l'égard d'un groupe, qui à commis l'outrecuidance de se faire connaître par des non-initiés). De "Fallen", pachydermique, psychotique, en passant par "Angels Of Distress", une géniale pièce de Doom débutant tout en douceur pour se développer progressivement, faisant intervenir leads de guitare cristallins, batterie échappée d'un cortège funéraire, violons, claviers revenus du néant, jusqu'à "Night's Dew" concluant sereinement l'album, "Angels Of Distress" fait monter la sauce de son Doom pour atteindre une saveur faisant de lui un disque à classer sans problème auprès des meilleurs œuvres du style.

Huggy : 99% (Avril 2002)



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