Tiamat - "A Deeper Kind Of Slumber"
Sweden - 1997 - Century Media - 60'00
1. Cold Seed
2. Teonanacatl
3. Trillion Zillion Centipedes
4. The Desolate One
5. Atlantis As A Lover
6. Alteration X 10
7. Four Leary Biscuits
8. Only In My Tears It Lasts
9. The Whores Of Babylon
10.Kite
11.Phantasma De Luxe
12.Mount Marilyn
13.A Deeper Kind Of Slumber

Line-up :
Johan Edlund : vocals, guitars & keyboards
Thomas Petersson : guitars
Anders Iwers : bass
Lars Sköld : drums

Etape supplémentaire dans la quête onirique et psychotropique de Johan Edlund, "A Deeper Kind Of Slumber" marque la fin de la collaboration de TIAMAT avec leur producteur fétiche Waldemar Sorychta - remplacé par Dirk Dreager -, l'arrivée d'effets empruntés à l'electro (boucles, samples, boites à rythmes…), et surtout de la fin de toute appartenance avec le Metal. Terminé les rauques interventions de Edlund, celui-ci se contente d'égrener ses vocalises d'une voix froide et monotone (ce n'est pas péjoratif), et terminé les gros riffs heavy. Concept presque entièrement voué aux expériences de Johan avec la drogue, cet album est un pas de plus dans la profonde incursion de TIAMAT dans des mondes totalement planants et éthérés, où la douceur et le malsain forment un ménage particulièrement "sympathique" et envoûtant. Après l'effet de surprise provoqué par cette radicale évolution vers une musique beaucoup plus calme et méditative, hypnotisante, avec de fréquentes incursions dans le monde du Trip-Hop ("The Desolate One", "Only In My Tears It Lasts", …), l'immersion de l'auditeur attentif ne peux être que complète dans l'univers décharné et déstructuré, oppressant mais relaxant de "A Deeper Kind Of Slumbero. TIAMAT approfondit le propos de sa musique et en modifie la forme, désireux de ne pas répéter le discours de "Wildhoney", mais au contraire de s'enfoncer plus encore dans l'onirisme et l'irréel. Le spectre de PINK FLOYD est plus présent que jamais, notamment dans les belles mélodies éthérées et les solos remplis d'émotion de Thomas Petersson, revenu au bercail ("Atlantis As A Lover", "Phantasma De Luxe" - sans conteste la plus belle pièce de l'album -, "Alteration X 10", …). Ce qui fait la force de ce "A Deeper Kind Of Slumber", c'est sa richesse immédiate, sa richesse cachée, sa diversité, sa profondeur, et sa sublime production. L'album fait partie de ces disques intemporels qui offrent toujours un petit quelque chose en plus à chaque écoute même après un bon millier de passage sur la platine. Instruments classiques présents ici et là (sur "Atlantis As A Lover" en particulier, "Kite" , …), instruments orientaux ("Four Leary Biscuits", bande originale parfaite d'un rituel de transe pratiqué par une tribu de nomades du désert où de superbes vocalises féminines font leur apparition), bruitages divers éparpillés et dissimulés un peu partout tout le long de cette heure qui passe malheureusement bien trop vite, l'album propose une palette de sonorités diverses, tel une toile de maître constituée non pas de couleurs juxtaposées et harmonisées mais de sons placés tel un grand et beau puzzle à contempler avec les oreilles et le cerveau. Sans être franchement gothique, TIAMAT récupère à son compte les froides atmosphères dressées par ce style et y ajoute une dose d'émotion et de beauté instrumentale typique de ses exercices vinyliques précédents. Le morceau d'ouverture, "Cold Seed" n'est pas vraiment représentatif du reste de l'album, induisant l'auditeur en erreur en l'amenant à penser que "A Deeper Kind Of Slumber" est composé de Rock Gothique entraînant mais peu original. Alors comment peut-on qualifier la musique de "A Deeper Kind Of Slumber", assez unique en son genre, inspirée PINK FLOYD, par ses propres œuvres passées, par le gothique, par le Trip-Hop, et par le Rock désenchanté d'une partie de la scène britannique ? Plutôt que de lui donner une étiquette, qualifions la simplement de géniale, d'une intensité époustouflante, d'une sagesse et d'une inspiration que son principal géniteur Johan Edlund ne saura pas retrouver sur les albums suivants. Le duo de clôture "Mount Marylin", longue et fantastique fresque de plus de 10 minutes, et le morceau donnant son titre à l'album, "A Deeper Kind Of Slumber", enfonce le clou en nous plongeant dans un bain glacé mais chargé de sentiments, une dernière fois avant que le silence ne reprenne ses droits. Malheureusement, le cruel monde de la musique étant ce qu'il est, l'album sera très mal accueilli par les anciens fans, sans doute parce qu'étant allé trop loin dans son exploration du royaume du rêve, de la contemplation, et des expériences hallucinogènes. "A Deeper Kind Of Slumber" marque l'apogée de la créativité de TIAMAT mais aussi le début de la descente lente et progressive de sa côte de popularité, handicapant durablement sa capacité à innover et de mettre sa chair et son âme a nu devant un public trop peu réceptif.

Huggy : 99% (Mai 2002)



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